AU POLLEN
J.H. Prynne
Éditeur :Eric Pesty Editeur
Livre
Langue d'origine :anglais (traduit en français par Abigail Lang)
Format :17,5 x 12,5 cm
Nombre de pages :32
Date de parution :15/03/2021
ISBN :978-2-917786-68-0
Prix :11,00 €
Argumentaire :
Dans le premier numéro de la revue Ligne 13 (printemps 2010), éditée par Francis Cohen et Sébastien Smirou, Abigail Lang a publié une première traduction des quatre premières strophes de To Pollen – traduction suivie d'un commentaire que nous reproduisons ci-dessous.
"To Pollen est l'avant-dernier livre de J. H. Prynne, paru chez Barque Press en 2006.
Let my eyes see the sun and be sated with light.
The darkness is hidden, how much light is there left?
When may the dead see the rays of the sun?
(Gilgamesh, Sippar i 13'-15')
La première des deux épigraphes à To Pollen cite la plus ancienne épopée, celle du grand roi qui ne voulait pas mourir, « être retransformé en argile » comme le dit le récit consigné dans une écriture cunéiforme sur tablettes d'argile. Dès son invention, l'écriture est liée à la mort. Dès son invention, l'écriture est liée au pouvoir politique, à l'affirmation de l'autorité étatique. Des fragments disloqués de discours d'autorité émaillent To Pollen : jargon militaire et financier, pathos de la presse, vocabulaire scientifique.
Le passage de l'épopée que cite Prynne proviendrait d'un fragment de tablette retrouvée à Sippar, à quelques vingt kilomètres de l'actuelle Bagdad. To Pollen récuse l'idée d'un thème ou d'un sujet, mais ce qui tonne tout au long de la séquence et en constitue le contexte, c'est bien la guerre d'Irak et ses répercussions lointaines. On décèle des références à Doha, capitale du Qatar et cadre de plusieurs conférences sur la libéralisation du commerce international, aux combinaisons orange de Guantanamo, ou encore à une bavure commise à Forest Gate par la police britannique au nom de la guerre contre le terrorisme. Comme dans l'épopée de Gilgamesh, la mort suscite la révolte et l'élégie.
« Une façon de bloc (venu) du Ciel » (Bottéro, p. 79), ainsi Gilgamesh rêve-t-il Enkidu avant leur rencontre. La formule évoque aussi l'opacité et la densité des poèmes de To Pollen qui déjouent toute appropriation. A chaque lecture des éclats de sens affleurent, clignent puis se redéposent sans qu'on puisse les saisir. La haute valence des éléments sémantiques et les constantes bifurcations syntaxiques démantèlent tout contexte local et rendent l'attribution des catégories grammaticales hasardeuse. À l'échelle du livre, on décèle plusieurs champs intriqués : guerre, finance, géologie, biologie, et le leitmotiv de l'inscription.
Dans le texte d'une des conférences qu'il a récemment adressées à ses traducteurs et lecteurs chinois, Prynne explique que « la difficulté » est un moyen d'atteindre la pensée poétique, définie comme une énergie dialectique qui vibre sur la page et dans l'esprit du lecteur et dont les limites sont sans cesse à repousser et à renouveler. L'art de Prynne est d'exploiter la puissance propre à la langue lorsqu'elle est mise sous pression par de nouveaux usages.
« L'extrême densité de l'irrésolu, qui maintient la langue à un haut niveau d'énergie dans son mouvement poétique, sa vibration furtive, peut bien ressembler à l'absence de clarté, ce qu'elle est en partie [...]. Dans cette matrice, la pensée n'est pas unitaire (contrairement aux idées) mais en conflit avec elle-même et intrinsèquement dialectique. » (Poetic Thought, Keynote Speech at the Second Pearl River International Poetry Conference, Guangzhou, P.R. China, 14th June 2008)."
Biographie ou Bibliographie de l'auteur :
J. H. Prynne est un poète anglais né en 1936. Bien qu'on lui connaisse une publication antérieure, il fait débuter sa bibliographie par Kitchen poems (Cape Goliard Press, 1968). Tous ses livres suivants ont été publiés sous la forme de plaquettes (chapbooks) chez de petits éditeurs – en marge donc du champ éditorial et académique anglais. L'intégralité de ses livres est aujourd'hui réunie en un seul volume de près de 700 pages qui en est à sa troisième édition : Poems chez Bloodaxe (2015).
Apprécié par les nouveaux avant-gardistes anglais (Barque Press notamment), J. H. Prynne a fait l'objet d'une note de Jean-René Lassalle sur le site Poezibao.
J. H. Prynne a été enseignant (littérature anglaise) à l'université de Cambridge. Il fut également professeur honoraire à l'Université de Sussex, et professeur invité à l'Université Sun Yat-Sen en Chine.
De J. H. Prynne, Éric Pesty Éditeur a publié en 2013 Perles qui furent, dans une traduction de Pierre Alferi.
Avec Poèmes de cuisine (traduit par Bernard Dubourg et l'auteur dès 1975) et Au pollen (traduit par Abigail Lang), Éric Pesty Éditeur entame une série de publication de livres de J. H. Prynne en traduction française. Cette série, dirigée par Grégoire Sourice, souhaite proposer à terme une sélection conséquente d'ouvrages de J. H. Prynne, afin de donner à lire les évolutions, la cohérence et l'importance d'une poétique construite sur plus de quarante ans.