Saadi ivre d'amour
Saadi ivre d'amour
SAADI & Abbas KIAROSTAMI
Éditeur :ERES / PO&PSY
Livre
Langue d'origine :Persan
Format :10,5 x 15,0 cm
Nombre de pages :96
Date de parution :03/10/2020
ISBN :978-2-7492-6569-8
Prix :12,00 €
Argumentaire :
Le Saadi de Kiarostami
« La poésie persane, classique ou contemporaine, manifeste sa présence dans le cinéma d’Abbas Kiarostami de bien des manières, par exemple par une citation dès le titre du film ou à l’intérieur des dialogues, et par la reprise de motifs traditionnels comme le vent ou le chemin sinueux, motifs empruntés à la poésie mystique. Le titre du fillm bien connu Où est la maison de mon ami ? est ainsi repris d’un poème du grand poète contemporain Sohrâb Sepehri. D’une tout autre manière encore, le film Shirin montre le visage des spectatrices d’une adaptation cinématographique de l’épopée Khosrow et Shirin. On peut aussi rattacher à la poésie, mais à la poésie japonaise, et au haïku en particulier, la structure de maint film de Kiarostami, caractérisée par l’effacement de la narration au bénéfice de l’image, comme dans la série des films expérimentaux intitulée Five, véritables haïkus visuels.
Mais l’on ignore souvent qu’Abbas Kiarostami a lui-même publié des poèmes. Il a écrit de la poésie dès son plus jeune âge et a continué à le faire tout au long de sa vie. Le lecteur français peut lire l’ensemble de cette poésie en version bilingue persan/français dans le volume de cette même collection paru en 2014 sous le titre : Des milliers d’arbres solitaires.
Abbas Kiarostami a publié un autre recueil, Sa’di az dashte khishtan faryâd, d’une manière toute particulière : il a puisé dans l’œuvre poétique de Saadi, figure majeure du panthéon poétique iranien, des vers ou des distiques et, en en transformant la disposition sur la page, a fait de chacun d’eux un poème bref. L’humour narquois, les jeux verbaux, le travail rythmique, sont partout présents. Le geste poétique de Kiarostami est à la fois anthologique et typographique. La poésie de Saadi se transforme alors en poèmes de Kiarostami. À travers ce recueil apparaît un sujet poétique tout à la fois enclin au concret, moraliste, au vrai sens du terme, amoureux et anticlérical. » (Franck Merger)
Le recueil d’Abbas Kiarostami se compose de plus de 600 poèmes brefs. La présente édition permet d’en découvrir 84.
Poèmes traduits du persan par Amin KAMRANZADEH, Franck MERGER et Niloufar SADIGHI
Photographie de Jacqueline SALMON
Biographie ou Bibliographie de l'auteur :
Abū-Muḥammad Muṣliḥ al-Dīn bin Abdallāh Shīrāzī, mieux connu en Occident sous le nom de Saadi ou Sa’di, né à une date incertaine, possiblement vers 1210 à Chiraz, et mort probablement en 1291 ou 1292, est l’un des plus grands poètes et conteurs persans.
Il est l’auteur du Golestan (« Jardin de roses »), du Boustan (« Jardin de fruits ») et du Livre des conseils. Il est reconnu pour sa maîtrise de l’écriture et la profondeur de ses idées.
Orphelin, tributaire d'une enfance pauvre et difficile, il quitte sa ville natale très jeune pour se rendre à Bagdad où il fréquente l'université. Les conditions instables suivant l'invasion mongole l'amenèrent à pérégriner pendant une trentaine d'années en Anatolie, en Syrie, en Égypte, en Irak, probablement aussi au Sind (dans l'actuel Pakistan, en Inde et en Asie centrale, où il rencontre des survivants de l'invasion mongole. Il fait également les pèlerinages à la Mecque, Médine et Jérusalem. Capturé par les Croisés à Acre, il reste esclave sept années avant d’être libéré par les Mamelouks. De retour à Chiraz, il écrira jusqu’à sa mort de nombreux poèmes sous le nom d’écrivain de Sa’di – en hommage à l’atabeg (régent) Abu Bakr Sa’d ibn Zangy (1231 – 1260).
Dans son Golestân (« Jardin de fleurs »), Saadi expose une série de contes moraux sur les comportements à tenir dans certaines situations de la vie. Ces contes peuvent être lus à de multiples degrés : certains purement moraux ou sociaux, d'autres plus spirituels. Une partie de son recueil est d'ailleurs toujours utilisée comme manuel d'enseignement soufi par de nombreuses communautés.
Abbas Kiarostami (Téhéran en 1940 - Paris 2016)
Réalisateur, scénariste et producteur de cinéma, il a signé plus de 40 films, parmi lesquels : Où est la maison de mon ami (1987), Close-up (1990), Le goût de la cerise (1997- Palme d’or du Festival de Cannes), Le vent nous emportera (1999- prix de de la Mostra de Venise), Ten (2002), Five (2005).
C’est aussi un photographe reconnu, dont les œuvres sont exposées dans le monde entier.
Mais à travers ces modes d’expression, c’est le peintre et le poète qu’il a commencé par être et n’a jamais cessé d’être, qui s’expriment.
Il a écrit près d’un millier de poèmes très brefs, caractérisés par une grande lucidité et humilité (parfois aussi autodérision) dans l’observation des comportements humains.
Toute l’œuvre de Kiarostami est tendue vers le retrait et l’épure : soustraire pour mieux montrer, s’abstraire de la narration pour inventer des formes d’écriture qui entrent en résonance avec le monde visible.
Cette œuvre invite d’abord au regard, elle nous pousse à imaginer, au sens premier, une série d’instants qui sont pure présence au monde, instants suggérés plutôt que décrits, où le lecteur est chargé de donner corps et matière aux images, d’achever le tableau.
Les sentiments sont ténus, épurés, dénués de tout pathos, éloignés du lyrisme de la tradition classique persane. Nulle préoccupation métaphysique, nulle transcendance dans ces recueils de haïkus laïques où se dessine une sorte de réalisme idéalisé.
Ne citant la poésie traditionnelle que pour mieux la détourner, Kiarostami crée une œuvre moderne et iconoclaste, qui a en commun avec le haïku l’image saisie au vol, l’instant fixé dans une fraction de seconde, comme sous l’objectif du photographe