Nos territoires sont les Thélèmes, les anciennes frontières. Des hommes les traversent, d’autres s’y installent. Certains en partent, d’autres y reviennent. Nos territoires sont poreux, à l’extrême, ils sont refuge, ils sont halte, et depuis très longtemps ils ne barrent plus la route à quiconque.
Nous gaspillons. Tout. Par « tout », j’entends le temps. Le temps nous le prenons et nous le gaspillons. Petit on sait faire, mais quand on est grand [ton temps est compté] ça devient de l’art.
Mes murs ont des ]oreilles[ petites mais nombreuses et tenaces, elles s’accrochent, noires, luisantes d’eau de mer, s’ouvrent à peine à peine mais les sons ont surtout
besoin de ces espèces d’espaces, secrets et à demi-fermés, qui les accueillent, long- temps, et les bondissent après, hors d’eux, place, faites place aux sons qui bondissent d’oreille[ à ]oreille et c’est ainsi un réseau tendu d’]oreilles[ entre les Thélèmes, tendez ]vent : sud-est force 3 à 4 revenant secteur Nord force 4 à 5 en seconde partie de nuit[
Juliette Mézenc, Journal du brise-lames